Forte en émotions, l’édition 2021 du Tournoi des 6 Nations fut un véritable feuilleton – très suivi – pour le XV de France.
Plus de dix jours après la fin du Tournoi, il est temps d’analyser froidement les prestations du XV de France et on peut dire que l’on ne s’ennuie pas avec cette équipe depuis le début de l’ère Galthié. Après dix années de marasme, le rugby français revit à haut niveau et semble désormais capable de décrocher un titre dans la principale compétition internationale de l’hémisphère Nord. L’an dernier, les Bleus nous avaient laissé de belles promesses mais qu’en est-il de ce début d’année 2021 ?
La France lance idéalement son Tournoi
Alors que le contexte sanitaire devenait plus complexe face à la montée des variants de la covid-19, la FFR obtenait de justesse le droit de participer au Tournoi en promettant d’appliquer un protocole encore plus strict que celui déterminé par le comité d’organisation du 6 Nations. Débarrassés de l’incertitude quant à leur participation, les Bleus entamèrent parfaitement ce nouveau défi par un match sérieux face à l’Italie. Comme toutes les autres nations qui affrontèrent les transalpins par la suite, la France empocha un bonus offensif et s’imposa largement si bien que l’on pourrait penser que l’Italie était finalement un barème pour démontrer l’homogénéité du reste des nations participantes.
Un exploit à Dublin
Une fois l’étape de Rome avalée telle une gaufre charnue, les tricolores se trouvèrent face à une formation irlandaise annoncée vieillissante – à l’instar du Pays de Galles – par certains observateurs. Mais loin de se faire des vieux os, le XV du Trèfle livra une bataille acharnée pour ne pas s’incliner une deuxième fois dans ce Tournoi après une première défaite face aux gallois. Fidèles à leur plan de jeu, les Bleus se montrèrent efficaces marquant presque sur chaque incursion dans le camp adverse avant de parfaitement gérer leur maigre avantage jusqu’au terme de la rencontre. Voilà qu’après dix années de disette à Dublin, le XV de France s’imposait de nouveau en Irlande. Un succès accueilli avec beaucoup de ferveur par les supporters et dans les rangs français. A l’issue de cet affrontement viril, les larmes de Brice Dulin, véritable symbole de la renaissance bleue, donnèrent à cette victoire une dimension encore plus importante et un élan de confiance avant de se préparer à recevoir l’Écosse.
Le XV de France coupé dans son élan par le « waflegate »
Vint ensuite le tour de l’Écosse ? Non ! Même pas remis de la victoire en Irlande le XV de France apprend que deux des siens sont positifs à la covid-19. La tempête politique et médiatique qui en découla relégua loin les exploits sportifs tandis que la communication désastreuse des pontes de la FFR amplifia cette affaire. On apprendra notamment que la bulle sanitaire, tant vantée dans la presse et auprès des instances gouvernementales, n’était finalement qu’une passoire dont les différents concernés empruntèrent les interstices à maintes reprises faisant ainsi voler en éclats le principe même de bulle. La Fédération fut alors chargée d’enquêtée sur elle-même pour savoir si les protocoles avaient bien été respectés. Donné en mille, le résultat de cette enquête blanchira quelques jours plus tard les acteurs du groupe France mais le mal était fait… Entre temps, le match contre l’Écosse fut reporté, les Bleus isolés, touchés et bien heureusement pas gravement atteints par un virus faisant d’énormes dégâts humains de l’autre côté des frontières de la bulle.
Les Bleus craquent à Twickenham
Après un mois sans jouer, sans véritablement s’entrainer le XV de France doit partir à l’assaut de la forteresse Twickenham. Pas vraiment dans la forme de leur vie depuis le début de la compétition, les anglais sortent un grand match face aux Bleus. Il en allait de leur honneur. Malgré cette opposition démentielle, la France a longtemps mis le XV de la Rose en déroute. Le scénario de Dublin se répétait avec des français cliniques. Contrairement à cette rencontre, la fin de match face à l’Angleterre fut de moins bonne facture. Les français manquaient de fraîcheur et le coaching partiel de Fabien Galthié n’aida pas l’équipe à retrouver de la lucidité. A froid, il est difficile de donner complètement tort à un sélectionneur qui, finalement, apprend en même temps que son équipe. L’équilibre entre maintenir ses cadres et les sortir pour faire entrer les finisseurs est bien maigre. Le coaching s’était avéré payant en Irlande, il fut perdant à Twickenham… En effet, en toute fin de match l’Angleterre arracha la victoire grâce à Maro Itoje, son meilleur soldat. Voilà les français défaits et privés d’un exploit tonitruant dans un stade où ils n’ont plus gagné depuis plus d’une décennie.
Un retour inespéré face aux gallois
Invaincus depuis le début du Tournoi, les gallois s’avançaient à Saint-Denis avec la volonté de décrocher le Grand Chelem. Pour la première fois de la compétition, le XV de France retrouvait le Stade de France et le match commença sur des bases solides avec deux essais de part et d’autre ainsi qu’une égalité à la pause. Déjà spectaculaire, la rencontre n’avait alors pas encore livré son verdict. La deuxième période fut d’abord à l’avantage des gallois qui s’échappèrent au score avant de voir les français réduits à 14 suite à l’expulsion définitive de Paul Willemse. On se disait alors que l’issue du match ne faisait plus de doute. Les hommes de Wayne Pivac se dirigeaient vers un succès probant à Paris et surtout un Grand Chelem. Mais, rattrapé par son indiscipline le XV du Poireau se vit retirer deux joueurs pour finalement terminer le match en infériorité numérique. En cinq minutes, la France renversa une situation bien compliquée. Charles Ollivon lança la révolte avant que la France, au terme d’une incroyable action, ne décroche une victoire bonifiée inespérée.
La désillusion
Ragaillardis après leur fin de rencontre face aux gallois, les tricolores devaient battre largement l’Écosse par un écart de 21 points et prendre un bonus offensif pour espérer soulever le trophée du 6 Nations. Tous les espoirs étaient alors permis même si la défense écossaise avait fait des misères aux attaquants des autres nations depuis le début de compétition. Premier couac, la météo. Il pleuvait des cordes sur Saint-Denis le soir de la rencontre. Alors que les Bleus étaient condamnés à pratiquer un jeu ambitieux, la pluie fut un premier obstacle et cela s’est fait ressentir rapidement avec des ballons souvent tombés. Les écossais marquèrent le premier essai de la partie avant que vienne la réponse française par Brice Dulin à 5 minutes de la pause. Équilibrée, la première période se termina avec une petite avance pour les Bleus. Mais le deuxième acte ne livra pas le verdict favorable attendu par la formation de Fabien Galthié. Malgré un superbe essai de Penaud, on ne senti pas les Bleus capables de renverser la vapeur comme la semaine précédente. Pis, les français craquèrent en toute fin de partie pour finalement s’incliner. Après l’exploit vint le temps de la désillusion dans une rencontre frustrante.
Des émotions vives et des regrets
Que retenir alors de cette édition du 6 Nations ? Premier point déjà évoqué précédemment : l’homogénéité de la compétition. Si le Pays de Galles s’est montré plus régulier dans ses performances, les autres nations, sauf l’Italie, livrèrent de belles batailles. L’Écosse, l’Irlande, la France et même l’Angleterre pouvaient espérer l’emporter cette année. Les Bleus se mêlent désormais au reste du gratin européen pour soulever un trophée qu’ils convoitent depuis 2010. Tout au long de la compétition, ils nous ont fait vibrer affichant des visages différents et beaucoup de caractère notamment face au Pays de Galles. Il subsistera également quelques regrets qui n’en sont pas vraiment finalement, évidemment on aurait aimé une issue favorable à ce XV de France qui se démène, mais cela montre aussi que l’équipe est perfectible. Le staff apprend, les joueurs apprennent. L’Équipe de France a encore le temps de se construire avant l’échéance suprême que sera la Coupe du Monde 2023. En attendant de conquérir des trophées, les Bleus ont conquit le cœur des supporters qui suivirent en masse les matches du Tournoi des 6 Nations et, pour l’instant, c’est peut être cela le plus important. En 2020 une équipe était née, en 2021 elle grandit.