Richard Escot, journaliste pour le Journal l’Equipe a publié « 50 stars du rugby mondial » aux éditions Solar.
Observateur de longue date, Richard Escot narre l’histoire du XV de France et du Rugby depuis plus de 35 ans. A l’occasion de la Coupe du Monde, il a publié « 50 stars du rugby mondial » aux éditions Solar. Depuis maintenant un mois vous avez vu les meilleurs joueurs du monde s’affronter, il est temps désormais de connaitre leur histoire. A travers des portraits, d’anecdotes, des parcours singuliers, Richard Escot présente les joueurs écrivant actuellement la légende de l’ovalie. Le néo-zélandais Beauden Barrett, l’irlandais Jonathan Sexton, l’anglais Owen Farrell et bien évidemment des Bleus comme Guilhem Guirado ou encore Louis Picamoles ont été « sélectionnés » pour cet ouvrage. A l’occasion de la promotion de « 50 stars du rugby mondial », Richard Escot a accepté de revenir sur l’état du rugby français et sur la Coupe du Monde.
Est-ce qu’il y a des stars dans le rugby français actuel ?
Non, cela m’a été difficile de vraiment extraire des stars. La seule vraie grande star qu’il y avait, et elle n’est pas dans cette Coupe du Monde, c’est Mathieu Bastareaud. Ça c’est que que l’on peut appeler une star. Après dans la mesure, et pour certains enfants je le vois dans leur regard, quand vous leur parlez de Guirado, de Poirot, de Priso ou de Dupont par exemple, ils sont émerveillés. Ils ont les yeux qui brillent et, à ce moment là, on peut considérer que pour eux, s’ils croisaient les joueurs dans la rue ou s’ils avaient la chance de s’en approcher, ne serait-ce qu’à moins d’un mètre, ce seraient des stars. Il faut toujours relativiser, il y a toujours une star qui brille plus qu’une autre. A l’heure actuelle, les stars françaises ne brillent pas énormément. Ils sont dans une galaxie très lointaine… Mais, toujours est-il que dans le regard d’un enfant, quand on évoque leur nom, et je l’ai vécu récemment, les regards brillent parce que pour eux ce sont des joueurs qu’ils admirent, auxquels ils s’identifient. Je pense en particulier à Dupont, à Huget, à Médard, à Priso, à Poirot, à Iturria qui sont des joueurs où on se dit « moi aussi ça peut m’arriver ».
Qu’est ce qui vous fascine chez les joueurs que vous avez sélectionné dans le livre ?
Cela fait quand même 35 ans que j’exerce cette coupable industrie qu’est journaliste rugby, ce qui me plait c’est l’aventure humaine et la possibilité qu’un joueur, quel qu’il soit, puisse s’élever au meilleur de ses potentialités. Que le milieu (social, ndlr) soit favorable ou pas. Parce que quand on est dans un milieu très favorable c’est parfois presque plus compliqué. Je prends le cas de Chris Ashton, même s’il n’est pas dans le squad anglais, c’est une star ! S’élever à ce moment-là, alors que l’on a un père qui est déjà une star du Rugby à XIII et devenir soit-même une référence, c’est quasiment aussi compliqué que de prendre le cas de Nakarawa ou d’un autre fidjien qui joue avec une balle de rugby qui est en fait une noix de coco sur la plage et pour qu’il arrive un jour où il va devenir le meilleur joueur de la planète il faut que tout s’aligne. C’est ça qui me fascine. Quand on a connu des joueurs comme Jean-Pierre Rives, Serge Blanco, Philippe Sella, David Campese, François Pienaar, John Eales, il n’y a pas grand-chose qui va me fasciner. J’ai eu la chance de côtoyer sur ces 40 dernières années des joueurs fabuleux, exceptionnels. Ce n’est pas tant la dimension sportive pure qui m’intéresse dans les joueurs d’aujourd’hui que leur trajet personnel et la capacité qu’ils ont à tirer le meilleur de leur potentiel. C’est ça qui m’intéresse. Au début c’était le terrain. Il y avait un espace de liberté et le physique au sens de la puissance pas au sens de l’athlétisation car des joueurs couraient très vite comme Blanco, Sella, Campese, ils étaient monstrueux. Tous les gabarits étaient représentés. C’était davantage le talent, l’instinct, les appuis, l’accélération que la destruction. A partir de Jonah Lomu on a bien vu que la dimension physique, la puissance, c’est-à-dire le rapport poids/vitesse était de plus en plus important. Et que de la place pour des magiciens comme les Shane Williams et compagnie, il y en avait moins. Il y en a aujourd’hui comme Cheslin Kolbe, Antoine Dupont, je ne dis pas qu’il n’y a pas de place pour eux mais ce n’est pas la même chose. Bien sûr il y encore de la place pour des génies, mais cela ne s’inscrit pas dans la même dimension tactico-technique, dans les combinaisons de jeu et du plan de jeu collectif.
Après toutes ces années, qu’est ce que l’on attend d’un mondial ?
J’attends d’un mondial qu’une équipe émerge, une nation que l’on attend pas. J’attends que le changement de jeu soit fixé. Une Coupe du Monde c’est toujours le moment où le jeu change et évolue. C’est ce qui va servir de référence et je pense que des équipes comme l’Angleterre, le Pays de Galles, la Nouvelle-Zélande toujours mais aussi l’Afrique du Sud sont capables de nous donner de nouvelles directions de jeu. De nous ouvrir des perspectives. Ce qui m’intéresse aussi c’est l’émergence d’un joueur. J’aime bien imaginer qu’un joueur va , comme Johnny Wilkinson l’a été en 2003, comme Brian Habana l’a été en 2007, d’un seul coup nous éblouir, nous surprendre, concentrer l’attention sur lui. Et je me demande lequel, est-ce que cela va être. J’avoue qu’aujourd’hui, je ne sais pas et c’est cela qui m’intéresse, c’est l’élément de surprise.